Par Stanislas et Zofia Coszczynski ♦
Extrait du Rosicrucian Digest – 1947
La doctrine de Louis-Claude de Saint-Martin est claire et simple. Sa vérité peut être perçue aisément par tout homme de bonne volonté, parce que ce mystique français a d’abord acquis la connaissance des lois divines et façonné sa doctrine en accord avec ces lois. À travers ses ouvrages, il désirait diffuser la lumière de la connaissance à lui échue par révélation, et pourtant, l’horreur d’un abus possible de la part de gens non préparés ou de mauvaise volonté et ceci de façon persistante, le conduisit à user du voile des symboles ésotériques lorsqu’il abordait les vérités destinées aux initiés. L’œuvre de sa vie a rendu son nom immortel, non seulement dans son propre pays mais à travers le monde, car le trait de lumière, qui a pour point de départ la source même de l’universelle lumière, brille irrésistiblement pour toute l’humanité.
Introduction
J’ai désiré faire le bien mais je n’ai pas désiré faire du bruit, parce que j’ai senti que le bruit ne faisait pas de bien et que le bien ne faisait pas de bruit. – L.C. de Saint-Martin
Dans la grande famille des nations, nonobstant les différences de race, de nationalité et de langue, il y a une certaine tendance, de la part d’hommes évolués spirituellement, à s’attirer les uns les autres ; les hommes aux âmes de nature semblable, qui cherchent la plénitude de leur humanité et qui, ne pouvant l’atteindre uniquement sur le plan physique, poursuivent cette recherche dans les régions supérieures où leur ardent désir les conduit au sanctuaire même du Dieu Vivant. Ces pionniers se reconnaissent les uns les autres à des signes visibles et invisibles et font montre d’un degré de développement et de renaissance en esprit réel et définitivement achevé. Dans certains cas de proximité spirituelle particulière, le lien qui existe entre eux devient si étroit que même ce qu’on appelle la mort cesse d’être un obstacle.
Une famille spirituelle unie n’existe pas à un moment donné dans la chair mais chacun de ses membres découvre tôt ou tard les traces de cette famille et les bienfaits qui en proviennent par les trésors spirituels secrets qu’ont accumulés ceux qui ont été des prédécesseurs. Chacun, sur le chemin du développement de soi, tend vers la connaissance de son propre Moi, chacun s’efforce d’éveiller le transcendantal, l’image éternelle enfouie en lui, afin de rendre perceptible et compréhensible le texte de la Divine pensée déposée en lui et afin d’atteindre à la plus pleine et à la plus pure manifestation de celle-ci. Ici l’on peut citer à propos les paroles de l’Évangile :
Cherche et tu trouveras… Demande et il te sera répondu.
Qui que ce soit qui désire ardemment, qui cherche avec persévérance et ardeur à atteindre à l’Idéal Divin de toute la force de son âme, est sûr de trouver aide et soutien.
En vérité, celui qui est courageux conquiert le Royaume des Cieux en surmontant l’opposition des instincts mauvais de la nature, en rejetant tout compromis et en tendant à jamais à s’élever jusqu’au Royaume de la Lumière et de la Liberté. Louis-Claude de Saint-Martin était un tel chevalier, arc-bouté à la recherche de la lumière.
Il a été reconnu comme étant l’un des plus grands mystiques de France, mais l’œuvre de sa vie ne figure pas seulement dans les ouvrages qu’il a écrits. Toute son existence fut vouée à l’idée d’une grande renaissance de l’humanité, et il a éveillé un profond écho non seulement en France mais aussi en Europe de l’Ouest et en Europe de l’Est. Nous trouvons des traces de son influence dans les œuvres créatrices de nos poètes prophétiques, plus particulièrement chez Adam Mickiewicz.
Pour pouvoir comprendre Saint-Martin, on doit approfondir son œuvre, l’on doit parcourir sa vaste correspondance, étudier sa biographie (publiée par Papus, Matter, Franck et d’autres), présentée par de nombreux auteurs et critiques, souvent de façon partiale et erronée. Un fin observateur n’aurait aucune difficulté à découvrir le Saint-Martin véritable, à découvrir de lui une image qui ne soit pas déformée. Son Moi réel passa par diverses phases de développement ; disciple et adepte de la science ésotérique de Martinès de Pasqually, qui était un humaniste, un théurge et un mystique, nous voyons les barreaux de l’échelle qu’il escalada par le titre même de ses ouvrages successifs : L’Homme de désir, Le Nouvel Homme, Le Ministère de l’Homme-Esprit.
Les traits principaux du caractère de Saint-Martin étaient une activité virile, une activité vigoureuse, et aussi, une sensibilité fine et féminine et un raffinement inné. Son attitude intrépide et inébranlable quand il se dressait dans la défense des idéaux qu’il professait, soutenus virtuellement par son mode de vie, le faisaient souvent sembler dur, même envers ses amis, mais il était le premier à en souffrir.
Il fallait qu’une certaine tendresse jaillissant du cœur s’efforçât d’alléger la peine qu’il ne pouvait s’empêcher d’infliger aux autres. Son mysticisme n’était pas abstrait et séparé de la vie. Louis-Claude de Saint-Martin s’efforçait de pénétrer au sein même de la Divinité, et avec la lumière de la connaissance, d’illuminer tous les aspects de la vie. Il avait découvert le secret du bonheur sur Terre, l’équilibre parfait entre la loi et le devoir, l’harmonie entre les idéaux professés et la vie de tous les jours. Il considérait que la coexistence des différents peuples devait être basée sur la fraternité, celle-ci conduisant vers l’égalité spirituelle de tous et vers la liberté qui est l’expression naturelle des principes de fraternité.
La doctrine de Saint-Martin est claire et simple. Sa vérité peut être perçue aisément par tout homme de bonne volonté, parce que ce mystique français a d’abord acquis la connaissance des lois divines et façonné sa doctrine en accord avec ces lois. À travers ses ouvrages, il désirait diffuser la lumière de la connaissance acquise par révélation, et pourtant, l’horreur d’un abus possible de la part de gens non préparés ou de mauvaise volonté et ceci de façon persistante, le conduisit à user du voile des symboles ésotériques lorsqu’il abordait les vérités destinées aux initiés. L’œuvre de sa vie a rendu son nom immortel, non seulement dans son propre pays mais à travers le monde, car le trait de lumière, qui a pour point de départ la source même de l’universelle lumière, brille irrésistiblement pour toute l’humanité.
2. Les années de jeunesse de Louis-Claude de Saint-Martin
Saint-Martin est né à Amboise, le 18 janvier 1743. On sait très peu de choses de son enfance. Sa mère est morte alors qu’il était encore tout jeune et cette perte dut avoir une profonde influence sur la manière dont fut façonnée sa personnalité. De là sa sensibilité extrême, de là le surdéveloppement du sentiment à la recherche d’une réponse, et la douceur de son raffinement. Entre lui et son père, il y avait un certain manque de compréhension et même dès les premières années d’activité de Saint-Martin, les éclats devinrent inévitables. On connaît peu de choses concernant ses frères, mais il semble également qu’il n’existait pas d’harmonie dans leurs relations. La tristesse étreignait le cœur de Saint-Martin dans sa prime jeunesse, mais sa réaction montra plus de force que de faiblesse.
À l’arrière-plan d’une enfance pas trop heureuse, s’élevait dans l’âme de celui-ci l’ardente aspiration à une vie supérieure ; l’absence d’amour dans le cadre du cercle familial l’incita à rechercher l’amour de Dieu. Les lettres de Saint-Martin nous disent à quel point il essaya consciencieusement de remplir ses devoirs envers son père, même au prix d’un grand sacrifice, faisant ainsi obstacle aux plans qu’il élaborait pour son propre futur. Après qu’il eut fini l’école, son père voulut qu’il étudiât le droit ; Saint-Martin obéit à son vœu. Néanmoins, il fut bientôt convaincu de l’impossibilité de continuer dans cette direction. Les complexités du Droit, sa relativité, allaient à l’encontre de ce qui faisait la trame de son caractère. Il était à la recherche d’une autre sorte de Droit, d’une autre sorte de loi.
À cette époque de sa vie, Saint-Martin ne pouvait pas voir clairement quel était son chemin, le pouvoir de volonté conscient lui manquait encore – de là sa seconde erreur : le service militaire. Ceci aussi ne dura pas longtemps, mais à ce stade de sa vie, quelque chose commençait à se cristalliser au sein de son être – une porte semblait s’ouvrir sur le jardin enchanté dans lequel il devait commencer sa mission. Il fit connaissance avec Monsieur de Grainville, un officier comme lui, et avec Monsieur de Balzac, tous deux disciples de Martinès de Pasqually. Graduellement leurs relations se firent plus étroites. Saint-Martin fut reçu dans le cercle intérieur de Martinès de Pasqually.
Il fut initié et devint pour Martinès de Pasqually un élève choisi et son secrétaire. Il quitta l’armée et se voua entièrement à son œuvre. L’idée de Réintégration de l’humanité avancée par M. de Pasqually l’attirait puissamment. Loyalement et avec une grande ferveur, Saint-Martin commença à exécuter tous les ordres de son maître, étudiant sa théorie, se soumettant aux pratiques recommandées et aux pratiques théurgiques.
3. Les influences significatives
L’amitié des femmes joua un rôle important dans la vie de Saint-Martin ; leur ton était plein de vivacité et d’enthousiasme. Ainsi, de la Duchesse de Bourbon, Madame de Bry, Madame de Saint-Dicher, Madame de Polomieu, Madame de Brissac et d’autres. Madame de Boecklin eut un rôle significatif dans la vie de Saint-Martin (grâce à sa haute spiritualité et à sa grande intelligence). Elle lui inspira de lire les œuvres de Jacob Boehme. Les années de sa vie qui précédèrent ne furent qu’une préparation, car maintenant son âme s’épanouissait, telle une fleur. La lumière de la connaissance spirituelle ruisselait des œuvres de Boehme dans l’être intérieur maintenant préparé de Saint-Martin et donnait une séduction inattendue à sa mission. Il ressentait une plénitude nouvelle, une liberté vis-à-vis de l’influence contraignante du monde extérieur, depuis lors devenu seulement un domaine propice à une action fructueuse.
La grande Révolution française épargna Saint-Martin. En tant qu’initié de haut degré, il pouvait aisément percevoir la signification d’événements terribles, mais, bien que compatissant à la masse de souffrance submergeant la France, il n’essaya jamais de prévenir les décisions du destin comme le firent d’autres initiés, selon Cazotte, mystique et homme digne et de haute moralité avec lequel il était en relation étroite. Quand la mort projetait son ombre sur Paris, fauchant des victimes de haute naissance, Saint-Martin se sentait en sécurité dans la ville, tandis qu’il apportait son aide à ceux qui en avaient besoin, sans crainte pour sa propre vie qu’il avait remise entre les mains de Dieu.
Quand il fut forcé de quitter Paris pour Amboise, il y resta presque jusqu’à sa propre fin. Il mourut le 13 octobre 1803. Les élèves de Saint-Martin déclarent que les derniers moments de sa vie furent extatiques. La lumière l’entourait et le transfigurait. Il avait déjà vécu sur un autre plan, et il prouvait que la mort d’un mystique et d’un initié est dépourvue de la crainte de l’inconnu. Pour une âme libérée, la mort permet de se défaire des limitations de la matière ; c’est un retour d’exil, une réunion avec le Père Céleste.
4. La mission
Après avoir lu attentivement les documents disponibles, nous proposons maintenant de présenter avec plus de précision les phases de développement de Saint-Martin. Son âme cherchait à se manifester dans la vie extérieure, d’une façon correspondant à ses aspirations et à ses désirs qui restaient encore vagues. Sa rencontre avec de Grainville et avec de Balzac apporta un changement à sa vie tout entière. Il sembla recevoir une directive patente quant à l’orientation future de sa vie. Depuis sa prime jeunesse, il était toujours prêt à une soumission empressée à l’impératif intérieur. Jamais sa nature extérieure ne s’y opposa. Cela semble avoir été comme la vision avant l’heure de sa propre mission, laquelle exigeait le renoncement, l’holocauste de sa nature inférieure, le contraire se faisant au détriment du service de la vérité, de la modestie et de l’humilité.
Martinès de Pasqually fut le premier instructeur de Saint-Martin. L’idée maîtresse de sa doctrine de la réintégration de l’homme, c’est-à-dire le retour à l’état premier qui était le sien avant qu’il ne plongeât dans le monde matériel des phénomènes, ravit Saint-Martin. Subjugué par la grandeur et la beauté de la vérité, il se voua volontairement à toutes les études nécessaires et à toutes les pratiques requises. Dans l’école de Martinès à Lyon, le chemin menant à l’Illuminisme conduisait à la pratique de la « magie cérémonielle ». Le but ultime était l’union avec Dieu. Martinès de Pasqually fonda une assemblée à Lyon sous le nom de Élus-Cohen. C’était une époque où les questions ésotériques, ou ce que l’on appelle la magie, éveillaient un grand intérêt.
Sous la direction de Willermoz, dont Saint-Martin fit la connaissance, la Loge de Lyon s’étendait. La doctrine magique et théurgique de Martinès de Pasqually semblait des plus appropriées à Willermoz. Répandre l’Illuminisme en France était sa mission. Il appréciait le travail de groupe. Des buts communs tout d’abord attirèrent l’un vers l’autre ces deux élèves éminents de Martinès, mais bientôt apparurent leurs différences de caractère et d’organisation psychique. Ils se séparèrent sur des questions de méthodes amenant au but ultime.
Willermoz choisissait la voie mentale qui exigeait un développement intellectuel et trouvait son expression dans la magie cérémonielle, tandis que Saint-Martin choisissait la voie du cœur et trouvait son expression dans la théurgie pure. Il considérait la magie comme étant indésirable car elle magnifiait le pouvoir de volonté individuelle qui conduisait souvent à l’orgueil et provoquait, si ce n’est la chute, du moins des faux-pas sur la voie de la renaissance. Au contraire, la théurgie telle que la connaissait Saint-Martin développait une humilité à jamais plus profonde, à cause du resserrement du lien avec Dieu par la prière et l’imploration.
Humilité et simplicité, ces deux traits dominants du caractère de Saint-Martin lui rendaient détestables la pompe et l’aspect plein de splendeur affectionnés par les Loges. Il était à la recherche d’une expression simple et directe des expériences de l’âme. Il voulait par-dessus tout voir et démontrer l’essence précieuse laissée par la communion avec les Puissances Supérieures.
C’est à cette époque qu’il écrivit son premier livre : Des erreurs et de la vérité. Essayant toujours, dans tout ce qu’il entreprenait, d’être aussi près de la vérité que possible, il signa le livre du nom de « Philosophe Inconnu ». Cet ouvrage inspiré, à cause de sa teneur inhabituelle entraîna beaucoup de discussions, spécialement dans les cercles des Illuminati. La thèse du livre est que par la connaissance de sa propre nature, l’homme peut atteindre à la connaissance de son Créateur et de toute la Création et aussi des lois fondamentales de l’Univers dont on trouve le reflet dans la loi faite par l’homme. C’est sous cette lumière qu’était montrée l’importance du libre arbitre, cette aptitude fondamentale de l’homme, aptitude qui, quand elle est mal utilisée, mène à sa chute et qui, lorsqu’elle est utilisée pour le bien le mène à l’affranchissement et à la résurrection dans l’esprit.
La vie extérieure du Philosophe Inconnu fut une trame vivante sur laquelle le fil de sa vie intérieure brodait le canevas, et pour que cette vie soit parfaite, il savait comment utiliser le moindre événement, heureux ou malheureux, y trouvant toujours un enseignement caché. Saint-Martin découvrait la grande valeur du silence, condition absolument nécessaire pour assurer l’inspiration. Le silence n’était-il pas un manteau protégeant le monde invisible de la profanation ? Néanmoins, l’école du silence était difficile pour un mystique de son tempérament, lui dont l’âme désirait par-dessus tout projeter la lumière dans les ténèbres de l’ignorance. Un dogme sec ne pouvait que faire obstacle au torrent créateur de sa vie intérieure – le silence ne pouvait enfermer comme derrière des barreaux son activité, mais il lui servit à prendre la mesure de l’or spirituel avant de le livrer à son élève.
Vint ensuite le livre de Saint-Martin : Le Tableau naturel des rapports qui existent entre Dieu, l’homme et la nature. L’homme a été privé de ses aptitudes et moyens supérieurs en raison de son plongeon dans la matière, si profondément qu’il en a perdu la conscience de sa nature première existant avant cette chute, nature première qui était un reflet de l’image de Dieu. Ainsi, l’homme fut-il assujetti aux lois régnant dans le monde physique. Par cette chute, l’homme s’écarta du cadre de ses propres droits et cessa d’être un lien entre Dieu et la nature. L’homme possède des aptitudes psychiques qui peuvent assujettir les sens et les forces de la nature, s’il devient indépendant, s’il se libère de l’emprise des sens, sans parler de la possibilité qu’il a de les faire lui servir à étendre le champ de sa connaissance.
L’homme, et c’est une règle en ce qui le concerne, possède la faculté de percevoir la loi, l’unité, l’ordre, la sagesse, la justice et la puissance à un degré supérieur. En s’y efforçant, de par sa propre volonté, il peut retourner à la fontaine de la connaissance qui existe encore en lui ; il peut restaurer l’unité qui fut le commencement de tout. La renaissance de l’homme a été rendue possible par le sacrifice du Sauveur, et maintenant tout homme peut prendre part à l’œuvre de restauration de l’ordre antique et revenir aux lois antiques qui sont au service de toute créature.
Saint-Martin était un adversaire résolu de la philosophie athée et matérialiste sévissant alors dans l’Europe tout entière. En cette période, l’on peut constater l’ampleur de la richesse individuelle du Philosophe Inconnu. Il réunit la connaissance acquise depuis le monde invisible avec celle de l’intelligence, et les deux choses réunies concourrent à la plénitude de ses enseignements qui traitent de tous les problèmes touchant les conditions de développement des individus, des sociétés et des nations. Ce fut l’époque de son infatigable activité, de ses nombreux contacts dans son propre pays et à l’étranger. Il trouvait du temps pour une vaste correspondance et partageait avec d’autres le fruit de ses connaissances. L’influence de Saint-Martin et la diffusion de ses enseignements en France, en Angleterre et en Russie datent de l’année 1785. C’est ce que montrent ses lettres dans l’œuvre de Longinov : Novikoff et les Martinistes russes.
Quand il était à Londres, il rencontra William Law, le mystique, et aussi Monsieur Belz, le fameux clairvoyant. Cette rencontre s’avéra très importante. Il devint l’ami de Zinovieff et du prince Galitzine qui introduisit le Martinisme en Russie. Si le Martinisme fut critiqué et persécuté, ce ne fut que le résultat de l’ignorance quant à l’essence et quant aux buts de cette doctrine, et ce fut aussi le résultat de fautes humaines de Martinistes occasionnels, natures faibles et immatures, inconstantes vis-à-vis des hauts standards moraux exigés par les enseignements de Saint-Martin.
La diffusion des enseignements de Saint-Martin s’accompagna d’un succès social personnel, mais la chaude sympathie, les amitiés sincères éveillées au contact de son attachante personnalité ne faisaient pas obstacle à sa vie intérieure. En faisant une application personnelle de ses enseignements, son être était si purifié que sa paix intérieure ne pouvait être mise en danger. Son âme assoiffée de plus de lumière en recevait dans une proportion supérieure et l’assimilait au bénéfice de la postérité. Il atteignit son apogée quand il fit connaissance des œuvres de Jacob Boehme. Il trouva là, la solution catégorique de tous les problèmes, au niveau du plus haut échelon conduisant à l’union avec Dieu le Père.
Jacob Boehme n’était pas un instructeur au sens où Martinès de Pasqually en fut un pour le jeune Saint-Martin, mais son importance fut plus grande car Saint-Martin était maintenant bien préparé à recevoir une révélation nouvelle par l’intermédiaire de Jacob Boehme. Une lumière nouvelle envahissait son âme, était assimilée et hâtait le processus intérieur de transformation. Nous trouvons un écho de ses expériences dans les lettres adressées à son ami proche, Kirchberger, baron de Liebistorf. Jacob Boehme était un mystique, par la grâce de Dieu. La révélation, la descente de la lumière, le ravissement de l’âme – de nombreuses expressions peuvent décrire le choc de l’âme soudainement éveillée.
Nous voyons les différents modes de l’Illumination quand le « vase d’élection » est préparé à la recevoir. Dans l’ouvrage de Saint-Martin L’Homme de désir, nous voyons la nouvelle graine produite par l’assimilation de la doctrine de Boehme. Cet ouvrage rappelle un des psaumes qui exprime l’ardeur de l’âme pour Dieu et qui déplore la chute de l’homme, ses erreurs et ses péchés, son aveuglement et son ingratitude.
Soulignant l’origine divine de l’homme, Saint-Martin a vu la possibilité d’un retour de celui-ci à son état premier, quand il est en accord avec la loi de Dieu. Mais ce n’est qu’en abandonnant la voie du péché et en suivant les enseignements du Rédempteur Jésus-Christ, le fils de Dieu, qui descendit des hauteurs de Son trône céleste par amour de toute l’humanité, que l’homme est digne seulement d’adorer et que, par l’amour et en L’imitant, il peut atteindre au Salut.
Qui sortira vainqueur de ce combat ? Celui qui ne se soucie pas d’être reconnu par les hommes ni de ce que ceux-ci se souviennent de lui, mais qui voue tous ses efforts à n’être pas effacé de la mémoire de Dieu. Si ce n’avait été la venue d’un homme qui pût dire : « Je ne suis pas de ce monde », quel aurait été le lot de la postérité humaine ? L’humanité aurait sombré dans les ténèbres, elle se serait trouvée séparée à jamais du royaume du Père. Mais si de nombreuses personnes se détachent de l’amour, celui-ci peut-il renoncer à elle ?
Dans son ouvrage ultérieur Ecce Homo, Saint-Martin prévient du danger qu’il y a à rechercher l’excitation des émotions, à rechercher les expériences magiques de bas niveau tels que la bonne aventure, le spiritisme et les phénomènes variés qui ne sont que l’expression d’états psycho-physiques anormaux de l’homme. Ce chemin conduit l’humanité vers des ténèbres inconnues et redoutables, il mène à une chute encore plus grande, tandis que le salut ne peut être atteint que par une renaissance consciente.
Dans son livre Le Nouvel Homme, publié la même année, l’auteur traite de la pensée comme d’un organe de renaissance, qui permet de pénétrer au plus profond de l’être humain et de découvrir la vérité éternelle de son être. L’âme de l’homme est une pensée de Dieu ; le devoir de l’homme est d’ôter le voile recouvrant le texte sacré et ensuite de faire de son mieux pour l’amplifier et le manifester tout au long de sa vie.
Dans son ouvrage De l’esprit des choses, Saint-Martin déclare que l’homme, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, peut pénétrer au sein de l’Etre, qui se trouve caché dans la création tout entière et qu’à cause de sa vue intérieure claire, il est capable de voir et de reconnaître les vérités de Dieu déposées dans la Nature. La lumière intérieure est un réflecteur qui illumine toutes les formes. De l’intensité de la lumière dépend le degré d’illumination et de discernement dont a besoin l’homme rené en esprit et lisant le Livre ouvert de la Vie.
Le livre de Saint-Martin Le Ministère de l’homme-esprit complète toutes les indications précédentes, présentant un but non dissemblable, celui de l’ascension d’une haute montagne. L’homme y grimpe, poussé par une nécessité intérieure et avec l’avant-goût de la victoire, qui apporte la liberté après tribulations et souffrances. Une liberté qui, dans ce cas, est synonyme des plus grandes bénédictions pouvant être atteintes sur Terre.
Il existe un rayon radical et unique pour découvrir et répandre la moralité et la bonté, et ce rayon, c’est le plein développement de notre essence intérieure immanente. Le plus haut sacrifice à faire pour sauver l’humanité a déjà été offert ; c’est maintenant à l’homme d’offrir, en un sacrifice volontaire, sa propre nature inférieure, de la crucifier, et ainsi de la libérer des entraves contraignantes de la nature grossière. C’est le retour de l’enfant prodige vers le Père à jamais rempli de charité et de pardon. C’est cela, atteindre à l’unité parfaite avec Lui : « Mon Père et moi sommes un. »
Chaque âme possède son propre miroir qui réfléchit l’Unique Vérité, chaque âme possède un prisme et un arc-en-ciel qui lui donnent ses couleurs, et c’est pourquoi les œuvres de Saint-Martin ne sont pas semblables à celles de Boehme. Les missions de ces deux hommes, dans la vie, étaient différentes aussi, quoique jaillissant de la même source – du même besoin de servir l’humanité en ouvrant à celle-ci un nouveau chemin à son progrès. Saint-Martin prisait hautement les œuvres de Boehme, même s’il les trouvait plutôt chaotiques et confuses.
Il voulait les offrir à ses compatriotes et traduisit les livres les plus importants de Boehme : L’Aurore naissante, Les Trois principes de l’essence divine, Quarante questions sur l’âme. Après la mort du Philosophe Inconnu, certains brefs écrits dont il était l’auteur furent publiés, parmi lesquels nous citerons Pensées Choisies, de très nombreux fragments éthiques et philosophiques, de la poésie également incluant Le Cimetière d’Amboise, Stances sur l’origine et la destination de l’homme, à côté de méditations et de prières.
Saint-Martin s’intéressait à la science des nombres. Il est vrai que son ouvrage Des nombres resta inachevé, mais il contient cependant beaucoup d’indications importantes que l’on ne pourrait trouver ailleurs ; il a analysé les nombres d’un point de vue métaphysique et mystique. Dans les nombres, il a trouvé une confirmation de la chute et de la renaissance de l’homme. Le nombre n’est pas pris dans le sens d’un signe mort, mais comme l’expression du Verbe Créateur.
Chaque nombre indique une certaine idée et agit sur plusieurs plans. Tout est l’expression de l’unité s’écoulant du sein de la Divinité. L’amour et le sacrifice furent à la base de l’acte de création. Le péché originel et la chute de l’homme, son dérèglement et son immersion dans la matière, doivent être rachetés par le sacrifice et l’amour du Créateur ; ceci seul peut accomplir le retour à l’Unité.
5. La révolution française
Les lettres et l’activité de Saint-Martin expliquent sa relation avec la Révolution française, chose qui pour beaucoup de critiques est restée obscure car il ne pouvait être compris que par ceux qui ont reçu l’Illumination et par les mystiques. Derrière tous les phénomènes se passant sur le plan physique, il y a le film du plan astral. Aussi longtemps que ceci n’est pas manifesté dans le monde visible, il y a des possibilités de changement, des possibilités de dévier le cours des choses par le sacrifice et par l’appel à la miséricorde Divine.
Nous connaissons l’histoire symbolique des dix hommes « justes » qui auraient pu sauver Sodome de la destruction. Les films astraux ne sont pas tous développés, dit-on, parce qu’ils peuvent être changés par des facteurs supérieurs dans le monde invisible et aussi par l’homme sur Terre. Mais une fois que le film fatal est développé, aucune puissance humaine ne peut stopper le cours des événements.
Saint-Martin, non seulement croyait, mais savait que si la Providence permet une fois la perception d’un film, apportant au peuple un malheur indicible, la Rédemption, si elle n’est pas volontaire, doit être imposée. Il voyait la Révolution française comme une image et comme une amorce du Jugement Dernier qui se poursuivra sur cette Terre, en s’effectuant graduellement. Il affirmait que la structure sociale ne peut être durable, qu’elle ne peut satisfaire la majorité et avoir un caractère élevé si elle n’est pas basée sur une connaissance parfaite de l’organisation psycho-physique de l’homme, si cette structure sociale ne correspond pas aux lois divines reflétées en lui.
Un législateur devrait avoir en lui une connaissance profonde de la nature intérieure de l’homme, sa conduite doit être morale, il doit trouver un ordre social exprimant connaissance, justice et pouvoir. Toutes les tentatives pour continuer sur des valeurs transitoires ou erronées ne conduisent qu’au désastre, quelle que soit la durée de ces tentatives.
Dans son ouvrage Le Crocodile, Saint-Martin dépeint la façon dont le mal s’insinue dans les choses saintes et avec quelle perfidie il distille son venin pour détruire ceux qui sont aveugles et insensibles. Mais le mal dispose d’un temps limité et il est facilement reconnaissable à des signes discernables, et ne peut mystifier ceux qui ont le regard de la conscience, ceux qui observent et sont des chevaliers au noble dessein.
Plus grande est l’armée rassemblée sous les bannières du bien, plus la victoire sur les rangs serrés et déloyaux mais qui vont toujours s’affaiblissant, du mal, viendra rapidement. La relation de Saint-Martin à la Révolution française dépendait de son type de connaissance – et quel autre homme possédait une telle vue intérieure des choses, spirituellement ? Il comprenait ce qui était en cours et œuvrait avec diligence dans le domaine du mysticisme. Il faisait aussi de son mieux pour résoudre le problème d’une organisation sociale qui soit juste et plus heureuse. L’influence de la Révolution française est évidente dans l’œuvre de Saint-Martin. Il ne pouvait en être autrement.
6. La doctrine de Louis-Claude de Saint-Martin
La doctrine de Saint-Martin s’est répandue largement dans le monde sous la forme d’un Ordre initiatique et a porté le nom d’Ordre Martiniste. Saint-Martin était pour l’initiation individuelle. Chaque membre était soigneusement choisi et il lui était donné l’opportunité d’un contact étroit et familier. Alors, l’Initiateur lui donnait les indications et les enseignements dont il avait le plus besoin et qui n’étaient pas au-dessus de sa compréhension.
Le chemin était plus long que celui consistant à travailler avec tout un groupe, mais il était plus sûr, puisque la pure doctrine demeurait inaltérée, qu’elle reposait sur les membres de l’Ordre et qu’elle gagnait ainsi force et expression. Tous les collèges de cet Ordre ne suivirent pas la ligne recommandée par Saint-Martin, cependant, et le résultat fut déplorable. Nous avons déjà dit que, selon Saint-Martin, l’homme était la clé de tous les mystères de l’Univers, l’image de la vérité tout entière. Son corps représentait l’image du monde visible tout entier et était lié à ce dernier. L’homme peut atteindre à la vérité tout entière par la connaissance de sa propre nature, au moyen de toutes les aptitudes qui sont en lui – physiques, intellectuelles et spirituelles.
Il doit comprendre profondément le lien existant entre sa conscience et son libre arbitre. Saint-Martin traite de ceci dans sa « Nouvelle Révélation ». Certains traits soulignent les similitudes qui existent entre l’homme et son Créateur. Ce sont les pouvoirs créateurs et le libre arbitre sans limite. Ces traits, même si ce ne sont plus que des reflets estompés de Dieu, ces traits peuvent œuvrer en parfait accord avec les lois – elles mènent à Lui et emportent l’homme vers la source de la bénédiction. Les mêmes caractéristiques, si elles sont mal utilisées, rompent l’union naturelle avec Dieu et soumettent l’homme à des puissances d’un niveau inférieur. L’homme a comme pouvoir la capacité de réparer le mal fait, si toutes ses aptitudes sont tendues vers ce seul objet.
Saint-Martin parle de l’Unité comme d’une cause première, comme d’une essence intime toujours vivace, dont tout émane. Ainsi, chaque être, aussi éloigné du centre soit-il ou sur quelque plan d’évolution qu’il soit, est lié à la cause première et fait partie de l’Unité, de façon similaire au rayon de soleil qui, sans qu’importe en quoi que ce soit l’éloignement dû à son voyage à travers les espaces infinis, est toujours relié au soleil par les ondes vibratoires.
La lumière centrale dont émanent tous les soleils, quoique faisant partie du système tout entier de soleils et de rayons, garde son indépendance et elle est différente de la lumière artificielle. Dieu est tout, mais tout n’est pas Dieu. La doctrine de Saint-Martin s’applique à toute l’humanité. Il désirait l’union de celle-ci au nom de l’amour et considérait la fraternité comme la base de la vie sociale. C’est une erreur que de prendre l’égalité des gens comme une base. Saint-Martin considérait que l’égalité était une constante mathématique, une expression de l’ordre et de l’harmonie. La fraternité est le facteur qui régule les relations entre les hommes et qui lie justice et charité, force et faiblesse.
Le mal, l’exploitation et la tyrannie ne peuvent demeurer dans la lumière de l’amour fraternel. D’une fraternité ainsi conçue dérive un sens juste et adéquat de l’égalité qui repose sur une relation de rapport entre les droits et les devoirs. Saïr, dans son Essai sur Saint-Martin, l’explique ainsi :
Le rapport entre la circonférence et son rayon exprimé en mathématique par la lettre π est toujours constant. Que le pourtour d’un cercle soit d’un millimètre de longueur ou d’un milliard de lieues, le rapport ne varie pas et l’on peut affirmer, par conséquent, que toutes les circonférences ont entre elles cette égalité de rapport.
La même chose est vraie de l’homme : la circonférence est son droit ; la loi est la limite que l’homme ne peut transgresser ; et le rayon, ou plutôt la surface décrite ou couverte par son rayon dans sa révolution autour du centre est le champ de son devoir. Au fur et à mesure que les circonférences s’accroissent, les cercles s’accroissent aussi ; au fur et à mesure que les droits de l’homme s’accroissent, ses devoirs s’accroissent en proportion.
Dans l’univers dont la loi est l’unité dans la pluralité, chaque chose repose sur l’ordre et l’harmonie. Pour que l’ordre et l’harmonie existent, il est nécessaire que chaque chose soit à sa place, en harmonie parfaite avec tous les êtres et toutes les choses. L’homme en tant qu’individu est des plus heureux quand il y a en lui un équilibre parfait entre droits et devoirs. C’est sur cet équilibre qu’est basée l’égalité : à plus de droits, plus de devoirs ; à moins de droits, moins de devoirs. Comme base de l’égalité, il doit y avoir la fraternité sans laquelle il y aurait la haine et la jalousie entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre.
Ce n’est que la fraternité qui peut unir la famille humaine dans les liens de la communauté. Dans une famille aimante et idéalement unie, chacun des membres de cette famille trouve sa place selon sa force et ses aptitudes, et chacun désire volontairement supporter le nombre de devoirs qui y correspondent et chacun d’eux désire jouir des droits qui sont sans conteste les siens. L’édifice social qui est construit sur une soi-disant égalité n’a pas de fondements durables, parce qu’ici la fraternité est imposée et n’est pas une condition volontaire. De la même façon, et conjointement à ceci, une répartition des tâches effectuées de la sorte ne concilie pas toujours justice et charité ; c’est une toute autre chose quand l’altruisme et la solidarité sont la base de la fraternité.
La liberté est pour chaque être l’effet qui suit l’observance stricte des limites assignées par la loi. Un homme qui transgresse la loi perd sa liberté en proportion. Pour être libre, l’homme doit soigneusement conserver l’équilibre entre ses droits et ses devoirs ; et s’il veut élargir le champ de ses droits, il doit reconnaître les devoirs additionnels que cela lui amènera nécessairement. En résumé, nous dirons que le bonheur de l’humanité consiste en l’union de tous les membres de sa grande famille. Cette union ne peut s’accomplir qu’au travers de la fraternité qui crée l’égalité par l’équilibre stable des droits et des devoirs, assurant en même temps la liberté, la sécurité et la préservation de l’ensemble.
7. La chrétienté véritable
On voit, d’après tout ce qui a été dit, que Saint-Martin était un profond penseur chrétien qui voulait frayer un chemin aux idées chrétiennes et les utiliser pour l’élaboration de la structure sociale. Selon lui, l’amour du Christ doit posséder le droit de régler la vie de l’homme. L’Ordre Martiniste est aussi une chevalerie chrétienne et chacun de ses membres est tenu d’œuvrer à son propre développement intérieur, passant par des phases de renaissance à jamais plus profondes jusqu’au point culminant de la naissance de Dieu en lui. Le devoir, en tant que membre de l’Ordre, est de servir toute l’humanité sans ménager ses efforts, sans prendre en considération l’intensité de ceux-ci, ni le sacrifice que cela impose. Le Martinisme était ainsi l’annonce de l’approche de l’Époque du Christ Cosmique qui se révèlera universellement dans les âmes des hommes, dans ce grand processus de transformation.
Dans son sublime travail, l’Ordre Martiniste Traditionnel rejoint l’Ancien et Mystique Ordre de la Rose-Croix (A.M.O.R.C.) dont l’influence illuminante sur l’humanité dure depuis des siècles, et qui est comme la fontaine éternelle de lumière s’écoulant en vue de la renaissance de l’humanité. L’Ordre Martiniste Traditionnel et l’A.M.O.R.C. étaient affiliés à l’organisation internationale connue sous le nom de F.U.D.O.S.I. (Fédération Universelle des Ordres et Sociétés Initiatiques). Pour tous les Martinistes qui vénèrent la mémoire de leur Maître bien-aimé, le Philosophe Inconnu, une dernière adjuration est contenue dans son testament :
La seule initiation que je recommande et recherche de la plus grande ardeur de mon âme est celle par laquelle nous pouvons pénétrer le cœur de Dieu et induire ce cœur divin à pénétrer dans le nôtre. Ainsi sera rendu parfait le mariage indissoluble qui fera de nous le frère, l’époux de notre Divin Sauveur.
Il n’y a pas d’autre voie pour atteindre à cette Initiation sacrée que de descendre au plus profond de notre être, en ne nous arrêtant jamais dans nos efforts tant que nous n’avons pas atteint le but, la profondeur où nous verrons la vivifiante racine ; et dès lors, de façon naturelle, nous donnerons un fruit correspondant à notre nature, comme il en est des fruits des arbres de cette Terre, soutenus par diverses racines au travers desquelles les sucs vitaux ne cessent de s’élever.