Attribué à Louis-Claude de Saint-Martin ♦
Extrait d’un manuscrit du Philosophe Inconnu nommé Un mot sur l’origine de tous les cultes par E, Dupuis, interprète des allégories religieuses. L’Ordre Martiniste Traditionnel en publia un extrait dans le livre intitulé L’Homme-Dieu, Traité des deux natures, par Jean-Baptiste Willermoz, édition DRC.
[…] « Avant le christianisme, on a admis un Dieu unique sous la dénomination de puissance. Les chrétiens lui donnent le même nom en y ajoutant le mot : Père ou Créateur, et en font une puissance créatrice qu’ils nomment Dieu, le Père tout-puissant.
Une puissance seule et infinie dans l’immensité du néant ne crée rien. Tout objet susceptible d’être créé n’existe en elle qu’en puissance. Pour qu’elle se détermine à créer, il faut qu’il émane d’elle une volonté ou un amour qui l’incite à donner l’existence à une chose plutôt qu’à une autre, et c’est cette volonté, cet amour, ce verbe, cette pensée arrêtée, que les chrétiens nomment Dieu le Fils ou la seconde personne de la Trinité, distincte de la première, quoique faisant unité avec elle, car on sait que la puissance n’est pas la volonté et que l’une ne peut pas opérer sans l’autre ; ainsi les deux, quoique différemment personnifiées, ne sont qu’un seul être.
La puissance et la volonté réunies peuvent créer un monde composé d’une multitude d’objets qui pourraient former un chaos, un désordre, une destruction des uns par les autres, une cacophonie, etc. Il faut, pour qu’une création réponde au but du créateur, qu’il émane de lui, par sa volonté ou son amour, un esprit de sagesse, d’ordre, d’harmonie, etc, qui établisse l’accord entre les objets créés, et c’est là ce que les chrétiens nomment le Saint-Esprit, du mot saint, qui veut dire régulier, et du mot esprit, qui signifie but, fin, etc.
Dieu est donc personnifié chez les chrétiens par la puissance, l’amour et la sagesse.
La Trinité est si bien établie qu’elle est indestructible par le raisonnement, car celui qui voudrait en nier l’existence la prouverait par le fait même de sa négation. Il nierait parce qu’il aurait la puissance de nier et qu’il en aurait la volonté, et en niant il emploierait tout ce qu’il aurait de sagesse logique pour persuader, ainsi il aurait agi par la puissance, la volonté et la sagesse, ce qui est la Trinité, avec laquelle il exécute toutes ses actions, comme étant l’image et la ressemblance de Dieu.
La seconde personne de la Trinité est l’esprit d’amour, que les chrétiens appellent le Christ, celui par qui tout a été fait et sans lequel rien de ce qui existe n’a été fait. Ils disent que pour se communiquer aux hommes, il s’est incarné dans l’humanité, afin d’y arrêter l’action du péché originel et nous replacer dans notre premier état de conjonction avec la toute-puissance divine, dont nous sommes séparés.
Pour prouver l’effet de cette conjonction de l’homme par la religion de l’amour, le Christ a opéré ses miracles et il a donné pouvoir à ceux qui l’observeraient d’en faire de pareils et même de plus grands. Il a encore voulu qu’on reconnût ses vrais ministres par les prodiges qu’ils opéreraient en son nom et par leur amour les uns pour les autres. » […]